Ça n’a rien à voir avec Dieu

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« Ma fille vit un emprisonnement. Elle est envoûtée comme dans une secte », raconte Mme C. Pour cette famille grenobloise, comme pour beaucoup d’autres en France qui souffrent de voir leurs enfants « retenus » par l’Opus Dei, le moment est venu de parler.

Nombre d’évêques ont déjà été alertés, certains ne cachant pas leur « trouble », mais, pour l’heure, aucun n’a souhaité condamner publiquement les méthodes de la garde rapprochée de Jean Paul II.

« Au début, nous étions très heureux de voir notre fille fréquenter l’Opus Dei, raconte Mme C, dont cinq des six enfants sont passés par l’Œuvre. Tous en sont sortis, à l’exception de Florence, vingt-huit ans aujourd’hui, dont huit passés à l’Opus Dei. Elle avait commencé des études de médecine à Grenoble. En situation d’échec, elle a trouvé refuge à l’Opus Dei. Notre fille était généreuse par nature, mais elle n’était pas sûre d’elle, elle ne savait pas choisir... Elle avait besoin qu’on décide pour elle. » Une « proie » facile pour l’Œuvre, qui allait rapidement prendre en main son destin. Aujourd’hui, Florence est infirmière à Paris. Sa « nouvelle famille », c’est l’Opus Dei.

Comment recruter des jeunes de milieux catholiques et bourgeois, sans que la supercherie n’éclate aux yeux d’esprits éveillés et dotés d’une culture religieuse ? « J’avais quatorze ans et j’étais élève au lycée Chaptal à Paris, raconte Dominique. Un jour, un camarade de classe m’invite dans un club de jeunes. L’accueil était chaleureux, en présence d’un prélat en soutane qui surveillait un peu tout. Plusieurs loisirs s’offraient à nous. Il y avait aussi une salle de travail, où une personne pouvait m’aider dans mes études. Pas d’activité religieuse en tant que telle, juste une causerie-méditation. »

Le temps a passé, plusieurs voyages à Rome et en Espagne où l’Œuvre peut accueillir les jeunes dans l’un de ses centres, et des week-ends au château de Couvrelles, pour des retraites où le silence était la règle. « Un laïc à qui je parlais régulièrement était devenu mon directeur de conscience. On m’a alors fait connaître les principes de l’Œuvre. »

Pour la plupart des jeunes, la rencontre avec l’Opus Dei s’effectue par l’intermédiaire d’un ami. Dans le cas de Mlle Véronique Pair-Peccate, vingt-neuf ans, c’est un jeune homme surnuméraire qui devait, au fur et à mesure que leur relation prenait de l’ampleur, l’inviter, d’abord par le prêt d’un livre, à découvrir le charisme de Mgr Escriva. Puis il lui a demandé de rencontrer un prêtre de l’Opus Dei, l’abbé Pallais. « J’étais prête à épouser ce jeune homme que j’aimais, mais pas à entrer à l’Opus Dei », explique-t-elle, après avoir fréquenté plusieurs mois l’Œuvre et découvert le mode de vie de ce microcosme. L’un n’allait pourtant pas sans l’autre...

La rupture était inévitable, comme Véronique allait le comprendre à l’écoute des propos de l’abbé Pallais : « Dieu ne se réjouit pas en cas de mariage “mixte”. L’important, c’est la communion spirituelle. » Au fil du temps, ses conversations avec l’abbé Pallais furent éclairantes. D’abord, des reproches : « Tu es allée trop loin, vous vous connaissez à peine... », puis des questions déplacées. « Il m’a demandé si j’étais vierge, si nous nous étions embrassés, quels gestes d’affection nous avions eus. » Plus tard, à propos de la rupture entre les deux jeunes gens : « Tu sais, la seule chose qui vaille la peine, c’est aimer Dieu. Les hommes te décevront, Dieu jamais. » Véronique allait de surprise en surprise.

Les causeries sur le thème de la vie étaient aussi très fréquentes. Le prêtre de l’Opus Dei allait même encourager Véronique à rejoindre le combat de Claire Fontana, mère de sept enfants et fondatrice de la Trêve de Dieu. « C’est une femme formidable qui fait ces actions dans les hôpitaux. Ils s’enchaînent dans les couloirs qui mènent à l’avortement et toute la journée est perdue pour les avorteurs. Après ils sont traduits en jugement, ils sont très courageux et ça leur permet de témoigner, de sortir dans la presse, de remettre en question le dogme de l’avortement. Ils font des choses magnifiques. Si tu veux un jour connaître Claire Fontana, je te la présenterai. »

Catholique traditionnel, Arnaud de Lassus a étudié méticuleusement l’Opus Dei. Membre du Groupe d’action familiale et scolaire, ancré à droite dans l’Église, il estime lui aussi que l’Œuvre a des « pratiques sectaires ». Pour avertir les familles catholiques des risques encourus par leurs enfants, il a publié une petite brochure décryptant les activités et méthodes de l’Œuvre. On y relève cinq points sur lesquels l’auteur est en désaccord total avec l’Opus Dei.

En premier lieu, l’organisation avance « masquée ». « Ils attirent l’attention des familles qui cherchent des structures éducatives pour leurs enfants, explique M. de Lassus. Ils sont bien encadrés, il y a une certaine discipline, et d’autres avantages, comme des séjours à la neige ou à l’étranger. Ces familles ne savent pas qu’elles les mettent dans une œuvre religieuse. Si l’enfant a le profil, il va être recruté. »

Deuxième grief : l’Opus Dei incite l’enfant au mensonge. « On dit au jeune qu’il ne doit pas en parler à ses parents. Sa vocation est une “fleur fragile”. C’est déposséder les parents de leur autorité. On peut penser qu’il y a ainsi beaucoup de fausses vocations. »

Ensuite, M. de Lassus dénonce le « manque de liberté des membres ». Il relève notamment l’obligation de se confesser auprès d’un prêtre de l’Opus Dei, ce qui est en contradiction avec la position de l’Église, qui « a toujours été pour la liberté du choix des confesseurs ».

Le mode d’action de l’Œuvre dans la société constitue un autre « danger » relevé par l’auteur de la brochure. « Je perçois chez eux une confusion entre spirituel et temporel. Les personnes qu’ils recrutent sont choisies dans l’élite intellectuelle du pays. Elles ont de grosses responsabilités civiles, alors qu’elles sont soumises à un pouvoir ecclésiastique, par un vœu d’obéissance. » Enfin, M. de Lassus dénonce « une sorte de négation de la doctrine sociale de l’Église ».

Tous ces arguments pèsent lourd. La plupart des familles victimes de l’Œuvre s’étonnent du silence de l’Église sur cette dérive sectaire. Pour autant, elles n’ont pas rompu avec la pratique religieuse. Lorsqu’on s’en étonne, elles répondent, comme Véronique Pair-Peccate : « C’est normal, l’Opus Dei, ça n’a rien à voir avec Dieu... »


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