Sur cent âmes, les cent nous intéressent

Bruno, 24.09.2008


Du temps où j’étais un jeune membre enthousiaste, j’avais invité mes amis à venir au centre croyant que chacun d’eux serait accepté tel qu’il était et que l’Opus Dei les aiderait dans leur propre quête en respectant leurs convictions. Dès le lendemain, le directeur du centre m’appela et m’expliqua comment il fallait comprendre cette fameuse phrase du Fondateur « sur cent âmes, les cent nous intéressent » : je devais laisser tomber les garçons qui ne donnaient aucun espoir de vocation et me consacrer aux autres.

Plus tard, je faisais partie du conseil local. Nous nous réunissions chaque semaine afin de voir concrètement comment il fallait traiter chaque personne qui venait au centre assister aux moyens de formation chrétienne, à des conférences (sans savoir que ces activités étaient liées à l’Opus Dei), etc. Chaque nouveau venu avait « son » numéraire qui faisait tout pour que celui-ci s’attache au centre. Il fallait ensuite l’attirer vers la direction spirituelle et enfin provoquer en lui la vocation à l’Opus Dei.

Un jour, on nous avait demandé de faire la liste des cent personnes les plus influentes dans la société, et de penser à des stratégies pour les attirer au centre. Bien entendu, le but était de les convaincre de leur « vocation divine » pour les gagner à l’organisation.

Nous nous efforcions donc d’attirer au centre des personnes « utiles » du point de vue de l’Opus Dei et de dissuader celles qui ne semblaient pas utiles. Nous proposions des conférences pour étudiants par différents moyens publicitaires. Quand des filles se présentaient, on leur fermait la porte au nez.

Je me souviens d’un étudiant venu aux conférences à la suite d’une publicité passée à la radio. Ce garçon avait une maladie dérangeante : il était vraiment très obèse et transpirait abondamment. En plus, ce n’était pas un génie, il était donc « inutile » pour l’Œuvre. Le conseil local décida de se débarrasser de lui mais ne pouvait le faire ouvertement parce qu’officiellement « sur cent âmes, les cent nous intéressent ». Il fallait donc ruser. Mon directeur avait un truc radicalement efficace, disait-il : il chargea quelqu’un de demander de l’argent à ce garçon chaque fois qu’il viendrait. Bien entendu, celui-ci ne revint plus jamais aux conférences...