Évolution de l’Œuvre: l’exemple de la Belgique

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Témoignage d’Alfredo


1965-1975 : commencement et premiers fruits

Les premiers membres de l’Œuvre arrivèrent en Belgique le 8 juillet 1965 à Louvain, où s’installa le premier centre (Arenberg), qui fut rapidement organisé comme une résidence d’étudiants. Le centre fonctionne toujours. En 1969, on ouvrit un deuxième centre à Bruxelles : Langeveld. Au début, il y avait dans ce centre toute sorte d’activités, du club pour enfants aux activités pour adultes. Actuellement, cette maison est occupée par le siège de la commission régionale. En 1975, un deuxième centre apparut à Bruxelles : Groenendael, au départ un club pour enfants, bien que maintenant il fonctionne comme centre pour adultes.

Le premier Belge admis dans l’Opus Dei en 1964 étudiait en Espagne. Il est prêtre à présent. Pendant cette première période sont entrés douze à quinze membres, qui ne sont aujourd’hui plus que six – cinq prêtres et un laïque. De 1974 à 1976, le nombre de demandes d’admission augmenta, ce qu’on appelle la première vague. La deuxième vague de demandes d’admission eut lieu au début des années 1980. On estime que le nombre total de numéraires en 1975 était de vingt-cinq personnes réparties dans les trois centres existants, sans compter les nombreux mineurs âgés de quatorze ans et demi à dix-huit ans habitant chez leurs parents. Cette première décade fut également importante pour la prise de contact avec les universitaires et les hommes politiques.


1975-1985 : développement et premiers problèmes

Dans les années 1970, l’université catholique de Louvain se divisa en deux. La partie francophone s’installa à Louvain-la-Neuve, où l’Opus Dei ouvrit un nouveau centre, Bauloy, en 1976. Deux nouveaux centres s’installèrent : pour les adultes, Middelheim à Anvers en 1980 et pour les enfants, Narval à Bruxelles en 1985. Aucun autre centre n’a été ouvert depuis, ce qui aujourd’hui limite à six le nombre de centres en Belgique. Au début des années 1980 à Liège, un appartement a été réservé pour les activités des quatre ou cinq numéraires masculins, sans jamais qu’un centre ne s’installe dans cette ville.

En 1978, l’Opus Dei acquiert le château de Dongelberg, non loin de Bruxelles, pour en faire une maison de rencontres et de retraites. Le château n’est pas utilisé, mais la grande maison située sur la propriété a été entièrement rénovée de 1988 à 1992. C’est là qu’on organise les cours annuels et les retraites.

Dans cette deuxième décade de l’implantation de l’Œuvre en Belgique, il y eut entre vingt-cinq et trente demandes d’admission, parmi lesquelles il reste seulement cinq personnes – trois laïques et deux prêtres. À cette époque, il y avait encore des numéraires qui venaient d’autres pays pour renforcer le développement de l’Œuvre dans cette région. En 1985, il y avait environ quarante-cinq numéraires répartis dans les six centres du pays.

En même temps, l’Opus Dei commença à avoir mauvaise presse avec, entre autre, la publication d’un livre contenant de sérieuses critiques de l’institution. L’image de l’Œuvre se détériorait dans les milieux catholiques de la classe moyenne, d’où venait précisément la majorité des jeunes membres. Le prosélytisme et les pratiques de l’Œuvre étaient de plus en plus connus dans ces milieux et dérangeaient beaucoup les familles de ces jeunes, particulièrement au sujet de l’éloignement des parents qui choque énormément dans les pays où la famille a une importance primordiale. Le témoignage des jeunes qui partirent et celui de ceux qui entretenaient un contact direct avec elle dessina un tableau très noir de l’Opus Dei au sein de la classe sociale qu’elle visait, au point où le club de Bruxelles se vida complètement – il ne restait plus que les enfants des surnuméraires – et dut ainsi déménager en 1985. L’accroissement constant des activités de l’Œuvre depuis 1975 se transforma en marasme dès 1985. Le même phénomène de déception et de distanciation arriva dans les milieux universitaires et politiques. Concrètement, il était devenu difficile de faire venir des professeurs ou des hommes politiques aux conférences organisées par les centres de l’Œuvre.


1985-1995 : stagnation

Comme je l’ai déjà signalé, aucun centre n’a été ouvert durant cette période. Un gros effort matériel a néanmoins été effectué pour les travaux de rénovation de la maison de retraite de Dongelberg. Il faut aussi signaler le conflit avec l’université catholique de Louvain-la-Neuve. Deux résidences estudiantines étaient installées dans des locaux loués à l’université – Bauloy pour les garçons, Neussart pour les filles. En 1994, l’université décida de ne pas prolonger le contrat de location afin de retirer son soutien à l’Œuvre. Les deux centres durent donc déménager rapidement. Deux terrains furent acquis pour la construction des nouveaux centres, qui dura un an et demi. Pendant les travaux, les numéraires habitaient dans un petit appartement et n’accueillaient pas d’étudiants dans leur « résidence ». Ces changements générèrent de gros besoins financiers et aboutirent à un endettement élevé de l’Opus Dei en Belgique.

Treize numéraires ont demandé l’admission pendant cette décade. Il reste quatre personnes, toutes laïques. Au même moment, treize numéraires quittèrent l’Œuvre. Jusqu’en 1990, quelques jeunes numéraires venaient en Belgique pour aider au développement de l’Œuvre. Depuis, les numéraires étrangers s’installent pour des raisons professionnelles et restent en général deux ou trois ans en Belgique. Quelques prêtres arrivèrent également pour remplacer ceux qui étaient repartis dans leur pays d’origine. En 1995, le nombre total de numéraire est de quarante-cinq. Le premier agrégé a demandé l’admission en 1993, et quatre autres l’ont suivi, jusqu’en 2005 – il en reste trois actuellement. Je ne sais pas exactement combien de numéraires auxiliaires ont demandé l’admission en Belgique, mais je ne crois pas qu’il y ait plus d’une Belge qui soit actuellement numéraire auxiliaire.

L’Opus Dei est un sujet qui fait vendre, régulièrement soulevé, la prélature étant toujours mal présentée. L’image de l’Œuvre dans les classes catholiques moyennes continue d’être assez négative et l’on observe un phénomène de claustration, la plupart des membres s’enfermant de plus en plus dans le milieu opusien.

Pour illustrer ce phénomène au niveau apostolique, il est intéressant de suivre l’évolution du nombre de participants de l’UNIV, le congrès annuel organisé par l’Opus Dei pour les jeunes à Rome pendant la semaine sainte. Pendant la première moitié des années 1980, un bus de cinquante personnes allait à Rome. À partir de la moitié des années 1980, il fallait partager le bus avec des personnes venant des Pays-Bas, de Suisse et de France. À la fin de la décade, il fallut renoncer au car et chercher d’autres moyens de transport, puisqu’il n’y avait pas plus de dix participants, y compris les numéraires. Depuis 1995, il n’y a pas de groupe chaque année. Et s’il y en a un, ce sont deux ou trois garçons accompagnés de deux numéraires, qui ne restent que quatre ou cinq jours, à cause du manque d’intérêt des participants.

Ce phénomène est comparable à la chute de l’engouement entre la béatification du fondateur en 1992 et sa canonisation en 2002. En 1992, plus de cinq cents personnes s’étaient déplacées de Belgique. En 2002, elles n’étaient plus que 300. Le groupe de jeunes avait loué un car de cinquante places pour la canonisation, mais sans réussir à le remplir, en dépit de la présence de vingt numéraires plus ou moins jeunes.


1995-2005 : la crise

Le seul projet économique d’envergure de l’époque était la construction d’une nouvelle résidence d’étudiants à Louvain, afin de remplacer le premier centre du pays qui s’y était trouvé de manière « provisionnelle » en 1965. Un terrain a été acheté en 1990, mais les différents projets architectoniques présentés ont été refusés par une mairie qui ne souhaitait pas permettre l’installation d’une nouvelle résidence de l’Œuvre en plein centre-ville. Comme le terrain est inoccupé, un squat du nom de Villa Squwattus Dei s’y est installé depuis l’été 2000, et des fêtes en tout genre y sont organisées. L’Œuvre a tenté plusieurs fois d’expulser les habitants, sans succès. À chaque plainte, la police locale se borne à constater l’occupation de la maison.

Du point de vue de l’opinion publique, il faut souligner la fameuse insertion de l’Opus Dei sur la liste des sectes, effectuée par le gouvernement belge en 1997. Bien que la liste n’ait finalement pas été votée par le parlement, l’image de l’Œuvre en a pris un coup et le phénomène d’enfermement des membres de l’Œuvre dans leur petit monde est toujours plus marqué.

Au niveau du nombre de nouvelles vocations de numéraires, il y en eut seulement trois en dix ans (l’un d’eux est déjà parti). En tout, onze numéraires ont quitté l’Œuvre ces dix dernières années. Il n’y a donc rien de brillant à souligner durant cette décade : ni nouveau centre, ni nouvelle vocation.

Mieux encore : après plus de quinze ans sans renforts de numéraires venus de l’étranger, deux numéraires arrivèrent en 2005 – l’un destiné à la commission régionale, l’autre, un jeune de dix-huit ans qui entreprit des études en Belgique, et est de fait le seul numéraire étudiant du pays. Le manque de personnel était effectivement devenu sensible après tant de départs, à tel point qu’il fallut chercher des renforts à l’extérieur. Ces derniers temps, les directeurs centraux estimaient qu’il valait mieux concentrer les efforts dans des pays qui semblaient plus prometteurs (Europe de l’Est et Afrique), et l’Espagne n’a plus les moyens d’exporter autant de numéraires que pendant les trente dernières années.

En dépit des nouveaux renforts (deux laïques et un prêtre), le nombre total de numéraires est tombé à trente-sept, dont treize prêtres, répartis dans les six centres. En fait, chaque centre est composé de deux à six laïques, c’est-à-dire du conseil local et d’un ou deux numéraires de plus.

Pour résumer l’évolution historique de l’Œuvre en Belgique, on peut observer une période de développement et une période de crise. Peut-être que le problème le plus grave de l’Opus Dei est son incapacité à reconnaître ses échecs et à changer réellement ses méthodes de travail pour s’adapter à la réalité de la vie actuelle. Beaucoup d’aspects qui paraissaient normaux il y a cinquante ans sont devenus totalement déplacés de nos jours, par exemple le rôle des numéraires auxiliaires ou d’une manière générale des femmes dans l’Opus Dei, le recrutement de mineurs, une pratique de direction spirituelle complètement anachronique, etc.


Quelques statistiques

Voici l’évolution du nombre de numéraires en Belgique, ainsi que la moyenne d’âge :

1985 1990 1995 2000 2005
Nombre de numéraires 44 42 43 42 37
Moyenne d’âge 32 ans 34 ans 37 ans 41 ans 46 ans


Cette stagnation apparente correspond à d’importants mouvements personnels (arrivés et départs d’étrangers, demandes d’admission et démissions, ainsi que deux décès). Depuis le début, des cinquante Belges qui ont demandé l’admission en tant que numéraire, il n’en reste plus que dix-sept, ce qui donne un taux de 66 % de départs, sans compter le nombre d’étrangers qui ont quitté l’Œuvre en Belgique (plus de dix). Ces vingt dernières années, il y a eu en tout seize demandes d’admission contre vingt-quatre départs.

1985-1990 1991-1995 1996-2000 2001-2005
Demandes d’admission 44 42 43 42
Départs 32 34 37 41


Cette situation globale (baisse du nombre de numéraires et augmentation de la moyenne d’âge) est similaire dans tous les pays où l’Opus Dei est présent depuis plus de 40-50 ans, sans obtenir un développement important. C’est le cas de la France, de l’Allemagne, des Pays-Bas, de la Suisse, de l’Autriche, de l’Irlande et de l’Angleterre. Les pays avec une forte implantation de l’Opus Dei, c’est-à-dire l’Espagne et l’Amérique Latine, connaissent la même évolution.

Il est évident que le nombre global de numéraires baisse depuis des années, mais il est impossible d’obtenir des statistiques valides de la part des organes officiels d’information de l’Opus Dei. Les chiffres officiels de développement restent constants, ce qui est peu crédible, étant donné que les entrées et sorties de surnuméraires sont aussi très fluctuantes.