De la sainteté de l'Eglise à la sainteté de l'Opus Dei

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Par Bruno Devos, paru dans La face cachée de l'Opus Dei en 2009.


Saint Josémaria était convaincu d’avoir reçu le 2 octobre 1928, une inspiration divine pour fonder l’Opus Dei. Cette inspiration a donné son nom à l’organisation, Opus Dei - Œuvre de Dieu, qui a été finalement reconnue par le Vatican et reçut en 1982 le statut de Prélature Personnelle.

Le Catéchisme de la prélature de la Sainte Croix et Opus Dei est l’explication de ce qui a été prévu dans les Statuts de la Prélature, afin que les fidèles de l’Opus Dei puissent connaître le droit particulier et l’esprit de l’Œuvre[1].

On doit considérer les normes des Statuts de la Prélature comme saintes, inviolables et perpétuelles[2].

L’Opus Dei, dans son interprétation de la forme juridique de la Prélature Personnelle, se compare à un diocèse. En conséquence, elle prétend appartenir à la structure hiérarchique de l’Église catholique. Cela faisant, elle s’approprie non seulement les caractéristiques propres à l’Église, mais, prétendant être la manifestation directe de la volonté divine, elle s’accapare également les attributs de Dieu lui-même : sainteté, inviolabilité, perpétuité. Cette sacralisation consacre l’absolutisme de l’institution.

L’Opus Dei est si consciente de la mission reçue de Dieu, qu’elle s’estime supérieure aux autorités du Vatican et n’accepte pas le statut juridique que l’Église lui a imposé. Les prélatures personnelles s’exercent en effet dans un cadre associatif, elles ne sont pas une structure hiérarchique. Les responsables de l’Opus Dei refusent également de se soumettre à la décision du Vatican qui, en lui assignant ce statut de prélature, a stipulé expressément que seuls les prêtres peuvent être membres de l’Opus Dei, les laïcs ne pouvant que coopérer de l’extérieur aux activités menées par la prélature. Pour s’en convaincre, il suffit de lire la partie du Code de Droit Canon qui parle des prélatures personnelles :

Can. 294 - Des prélatures personnelles constituées de prêtres et de diacres du clergé séculier peuvent être érigées par le siège apostolique.
Can. 296 - Moyennant des conventions établies avec la prélature, des laïcs peuvent s’adonner aux tâches apostoliques de la prélature personnelle.

Si certains prêtres du clergé séculier peuvent faire partie d’une prélature, il est clair, en revanche, que la coopération des laïcs s’effectue sur la base d’un contrat librement établi et résiliable par les deux parties. Ceci ne correspond pas à la réalité dans l’Opus Dei. L’adhésion y est présentée aux membres (y compris aux mineurs) comme étant de nature proche du sacrement de mariage ou du sacerdoce. C’est totalement faux !

Un autre abus consiste à confondre la volonté de Dieu avec celle des directeurs. Dans les règles codifiant l’obéissance monastique, il est acquis que le supérieur n’a pas toujours raison. Dans l’Opus Dei, en revanche, le directeur-représentant-de-Dieu a toujours raison :

L’esprit de l’Œuvre incite ses membres à avoir une confiance à la fois fraternelle et filiale envers tous les directeurs, sans crainte ni méfiance. Il les pousse à les considérer comme les représentants de Dieu notre Seigneur[3].

Les conseils reçus pendant la direction spirituelle avec le directeur ressembleront habituellement à des orientations ou des conseils, mais celui qui les reçoit doit les accepter « comme s’ils venaient de Jésus-Christ Notre Seigneur lui-même »[4].

Nous ne pouvons oublier que là où nous sommes le plus efficace, c’est là où nous ont placé les directeurs : car telle est la volonté de Dieu[5].

La vénération vouée au fondateur est tellement intense qu’elle devient ambiguë. Là où le chrétien est invité à revêtir le Christ, pour un membre de l’Opus Dei, imiter le fondateur pourrait devenir une fin en soi.

Nous devons toujours agir comme le ferait notre Père : c’est le critère le plus sûr[6].

Mère, fais que nous ressemblions de plus en plus à notre fondateur, ainsi nous serons tes bons fils[7].

Cette vénération n’est pas un culte inventé par les ardents successeurs du fondateur. Saint Josémaria se considérait lui-même comme un prophète, comme le porte-parole du Seigneur :

Si vous n’écoutez pas mes indications, Dieu vous demandera des comptes. Car Jésus-Christ passe par moi pour s’adresser spécialement à vous[8].

Si vous ne passez pas par ma tête, si vous ne passez pas par mon cœur, vous avez perdu le chemin, vous avez perdu le Christ[9].

Son premier successeur, Don Alvaro, accroît encore la confusion entre l’imitation du Christ et l’imitation du fondateur :

Notre Père [le fondateur] ne pourra agir en nous que si nous développons une attitude docile à l’action du Saint Esprit qui nous pousse à nous laisser modeler par les directeurs, à bien accepter la correction fraternelle, à ouvrir notre cœur avec sincérité dans la direction spirituelle… Ainsi la grâce de Dieu entrera à flots dans notre âme et nous transformera en Opus Dei. Et, si nous avons été fidèles, quand nous nous regarderons dans le miroir de l’examen de conscience, nous ne verrons pas le pauvre reflet d’un être plein de misères, mais le visage de notre Modèle, Jésus-Christ, et celui de notre Père[10].

On ne sait plus très bien si c’est le Saint Esprit qui agit en nous, ou le fondateur. Peut-on compter sur les directeurs pour nous éclairer ?




  1. Catéchisme de la Prélature de la Sainte Croix et Opus Dei (édition 2003), n° 349.
  2. Ibid., n° 354.
  3. Ibid., n° 151.
  4. Expériences sur la manière de mener l’entretien fraternel, 19 mars 2001, p. 12 i 49.
  5. Saint Josémaria, Instruction, 31-V-1936, n° 10.
  6. Méditation Ressembler à notre Père, Crónica, juin 1985, p. 590-596.
  7. Don Alvaro, Réunion 26 juin 1977, Crónica, 1977, p. 763.
  8. Saint Josémaria, méditation Le bon pasteur, 12 mars 1961.
  9. Saint Josémaria, Méditations IV, p. 354.
  10. Don Alvaro, tertulia 26 juin 1977, Crónica, 1977, p. 763.


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